Que dit la Bible sur la prédestination ?

 

1+TIMOTHÉE+2+4©janvier 2019 – Albert Leclercq – Que dit la Bible sur la prédestination –

Première approche

La question de la prédestination et la polémique qui a tourné autour de ce sujet fait partie des questions « épineuses » qu’on trouve dans la Bible. Certains ont été insultés, excommuniés, torturés et même tués parce qu’ils ne partageaient pas les mêmes pensées que les grands théologiens de leur époque. Aujourd’hui encore, certains adeptes de la « double » prédestination jettent le trouble parmi les chrétiens les plus sincères.

Au fait, si on parle de la prédestination, on doit aussi parler de la notion de la liberté de l’homme et de la souveraineté de Dieu. Ce sont deux vérités qui trouvent des fondements dans la Bible, mais l’histoire n’a pas été aussi simple.

Liberté de l’homme et souveraineté de Dieu

Quand Calvin écrit son ouvrage le plus important (Institution de la Religion Chrétienne), il combat l’idée qui s’était introduite par les Scolastique du XIe siècle, pour qui l’homme était pécheur, mais ses facultés intellectuelles n’avaient pas été totalement perverties par le péché d’Adam et Ève. Ils soutenaient donc que par lui-même, l’homme pouvait accéder au salut. Constatant les dérives d’une telle théologie, Calvin reprend les idées d’Augustin au sujet de la souveraineté de Dieu. Il démontre que l’homme, à cause du péché est perdu et est totalement dépourvu de tout moyen de connaître Dieu. Le salut est une grâce imméritée et vient entièrement de Dieu. « Car c’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu.  Ce n’est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie » (Eph 2.8-9). Ce sont les versets de base de la foi évangélique. Les œuvres ne sauvent pas ! Mais lorsque nous sommes sauvés, Dieu a préparé des œuvres afin que nous les pratiquions. « Car nous sommes son ouvrage, ayant été créés en Jésus-Christ pour de bonnes œuvres, que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions » (Eph 2.10).

Positions de Calvin

Mais Calvin va jusqu’à dire que la volonté de l’homme est devenue si corrompue que, sans le secours de Dieu, il ne pourrait même pas se repentir, croix ou faire un choix judicieux. Par conséquent, pour Calvin, le salut ne peut qu’être l’exécution d’un décret divin qui fixe d’avance qui sera sauvé et qui ne le sera pas ! Mais alors pourquoi Dieu ne sauve-t-il pas tous les hommes. Calvin répond par l’idée que Dieu a prédestiné certains à être sauvés, les autres à être perdus. Comme Calvin ne fixe son attention que sur la souveraineté de Dieu, il en fait un être au dessus des hommes et qui déciderait tout à sa place. Cela veut aussi dire que Christ ne serait mort que pour certains hommes.

C’est là que Calvin va trop loin, car il s’oppose à certains passages qui démontrent clairement que Jésus est venu pour sauver le monde : « Dieu, en effet, n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour qu’il juge le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui » (Jn 3.17) et « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jean 3:16 ).

Cette position est troublante, car même si elle trouve certains versets qui semblent la supporter, elle met à mal le grand principe de la Bonne Nouvelle que nous devons annoncer, afin que celui qui croit soit sauvé. « Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Mc 16:16). Cette position extrême entraîne les croyances suivantes :

  • Dieu a créé le méchant pour l’enfer. Mais comment réconcilier l’idée d’un Dieu « bon » qui créerait le « méchant »… c’est impossible ! Même Lucifer a été créé parfait jusqu’au jour où l’orgueil a été trouvé chez lui !
  • De plus, si on pousse cette position plus loin, Dieu ne voudrait pas que tous les hommes soient sauvés, contredisant  le verset disant : «  Cela est bon et agréable devant Dieu notre Sauveur, qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tim 2.4).
  • De plus, l’homme n’aurait rien à faire pour saisir ce salut, alors que nous avons mis l’importance sur la foi, comme moyen de saisir ce cadeau, et de la sanctification comme style de vie pour demeurer dans ce salut : « Recherchez la paix avec tous, et la sanctification, sans laquelle personne ne verra le Seigneur » (Heb 12.14).
  • L’homme sauvé un jour, serait sauvé pour toujours, et il nous faut enlever tous les versets qui parlent de la sanctification et de la persévérance.
  • La grâce de Dieu, est comprise comme une grâce irrésistible, ramenant l’homme à l’image d’une marionnette qui n’a ni choix à faire, ni grâce à accepter. On enlève la substance à l’Évangile. Alors que les Écritures montrent qu’on peut se priver de cette grâce par notre attitude : « Veillez à ce que nul ne se prive de la grâce de Dieu » (Héb 12:15).
  • L’homme serait donc irrésistiblement forcé à « aimer Dieu », sans participation de sa part ! Comment alors comprendre que le premier commandement nous demande justement. « Il répondit : Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée ; et ton prochain comme toi-même » (Luc 10:27) ?

C’est quelques réflexions nous montrent que la position de Calvin présente quelques faiblesses, que de nombreux chrétiens ont suppléés.

L’autre position

Déjà au temps de Calvin, des gens se sont levés contre ces pensées, mais ils ont été persécutés.

  • Les Mennonites

Les plus connus sont les Mennonites qui prônaient le choix individuel et le baptême des adultes comme signe de leur prise de décision de suivre Jésus. Et Luther et Calvin ont été intransigeants avec ceux qui suivaient leurs enseignements et les premiers martyrs sont morts pour ne pas avoir pensé comme les grands réformateurs. Alors que la Réforme était un mouvement de retour aux Écritures saintes, elle allait commettre les mêmes erreurs qu’elle dénonçait dans la grande église de l’époque ! Quel drame !

  • Les partisans d’Arminius

L’enseignement d’Arminius est le suivant: La volonté de Dieu est que tous les hommes soient sauvés parce que Christ est mort pour tous : « Mais celui qui a été abaissé pour un peu de temps au-dessous des anges, Jésus, nous le voyons couronné de gloire et d’honneur à cause de la mort qu’il a soufferte, afin que, par la grâce de Dieu, il souffrît la mort pour tous » (Héb 2:9). A cette fin, Il offre Sa grâce à tous. Tandis que le salut est l’œuvre de Dieu, absolument gratuite et indépendante de toutes bonnes œuvres ou des mérites, l’homme a toutefois certaines conditions à remplir. Il doit choisir, soit d’accepter la grâce de Dieu, soit de résister et de la rejeter.

Les Écritures enseignent la prédestination, mais non que Dieu prédestine les uns à la vie éternelle et les autres à la souffrance éternelle. Il prédestine «quiconque veut» à être sauvé, et ce plan est assez vaste pour inclure tous ceux qui veulent réellement être sauvés. Cette vérité a été expliquée comme suit: A l’extérieur de la porte du salut nous lisons ces mots: «Quiconque veut, peut venir.» Quand nous entrons et sommes sauvés, nous lisons ces mots: « Élus selon la prescience de Dieu ». A cause de sa connaissance, Dieu a prévu les personnes qui accepteront l’Évangile et demeureront sauvées, et les a prédestinées à un héritage céleste. Il connaissait d’avance leur destinée, mais II ne l’a pas fixée.

Que dit la Bible sur la prédestination ?

Prenons d’abord les versets qui en parlent :

  • Dans Romains 8.29-30 nous lisons : « Car ceux qu’Il a connus d’avance, Il les a aussi prédestinés à être semblables à l’image de Son Fils, afin que Son Fils soit le premier-né de plusieurs frères. Et ceux qu’Il a prédestinés, Il les a aussi appelés ; et ceux qu’Il a appelés, Il les a aussi justifiés ; et ceux qu’Il a justifiés, Il les a aussi glorifiés. »
  • « nous ayant prédestinés dans son amour à être ses enfants d’adoption par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté » (Eph 1:5),« En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant la résolution de celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté » (v.11),
  • « nous prêchons la sagesse de Dieu, mystérieuse et cachée, que Dieu, avant les siècles, avait destinée pour notre gloire » (1 Cor 2:7).

La Bible nous enseigne la prédestination, mais faut-il encore bien la comprendre.

Les mots traduits par « prédestinés » dans les passages cités ci-dessus sont des dérivés du terme grec proorizo, qui signifie « prédéterminer », « décider à l’avance ». La prédestination, c’est donc Dieu qui décide à l’avance des événements à venir.

Mais qu’est-ce que Dieu a prédéterminé ? Les divergences viennent des réponses données.

  1. Selon les calvinistes, la prédestination est une doctrine biblique qui affirme que Dieu, dans sa souveraineté, élit certaines personnes pour qu’elles soient sauvées.
  2. Selon les autres, dans sa prescience, Dieu sait qui acceptera le salut et met sur cette personne son choix et son élection. Une fois sauvée, ces personnes sont (pré)destinées à devenir enfants de Dieu et à être semblable à son Fils.

Il y a donc des versets qui démontrent clairement une décision prise par Dieu avant de créer le monde et d’autre part, des versets prouvent que Dieu laisse à l’homme la liberté et le choix qu’il doit faire pour entrer dans cette élection.

La grande difficulté est de permettre à ces deux vérités à cohabiter dans notre petit cerveau. Parce que si Dieu est Tout Puissant et Omniscient (qui connaît toutes choses), la liberté de l’homme n’a pas sa place. Mais si l’homme peut choisir et que les choses dépendent de l’homme, Dieu perdrait une partie de sa souveraineté.

Notre mathématique ne peut concevoir une formule où l’axiome “x” serait opposé à l’axiome “y”, et pourtant les deux axiomes seraient “vrais”. Cette science nous dépasserait. Nous ne pourrions pas y adhérer et pourtant, il semble bien que cela soit le cas ici. Nous trouvons le même principe dans la doctrine de la Trinité où, pour reprendre l’exemple mathématique, 1 + 1 + 1 = 1. Ce qui donne une formule qui ne serait pas juste selon notre système humain.

Il existe bien trois “personnes” dans la trinité, mais elles ne forment qu’une essence, qu’un être : Dieu.

L’équilibre indispensable

Comment gérer cette tension entre ces deux vérités ? Il semble que l’équilibre entre ces deux vérités est le chemin le plus raisonnable et le plus humble à prendre. Il nous faut absolument rejeter les extrêmes qui se sont développés des deux côtés. Opposer ces deux vérités nous conduira à l’erreur et même à l’hérésie.

Par exemple, trop insister sur la souveraineté de Dieu et à la grâce irrésistible, peut nous conduire dans une vie chrétienne qui perd sa saveur, sa pureté et sa remise en question nécessaire à la sanctification. De même donner trop d’importance à la liberté humaine et à sa responsabilité peut conduire les chrétiens à l’esclavage du légalisme, où aux doutes qui nous enlève toute assurance. La licence et le légalisme sont les deux extrêmes à éviter.

On raconte que quand le grand prédicateur Finney exerçait son ministère dans une église où la notion de la grâce avait été déformée, il appuyait fortement sur la doctrine de la responsabilité de l’homme. Et quand il tenait une réunion dans une communauté où la responsabilité humaine avait été prônée, il mettait l’accent sur la grâce de Dieu.

C’est en relisant la biographie de John Wesley (l’homme de réveil et le fondateur des Méthodistes), que j’ai redécouvert qu’il avait été fortement marqué par l’enseignement d’Arminius. Alors qu’il faisait équipe avec le pasteur Whitefield, qui suivait l’enseignement des calvinistes, ils eurent de nombreuses discutions ensemble. Vers la fin, il a accepté d’être plus souple avec les positions concernant la prédestination mais il termine par ce texte :

« Mais je ne peux pas croire:

  • Que tous ceux, en qui la grâce de Dieu n’agit pas d’une manière irrésistible, doivent être damnés; ou
  • Qu’il y ait eu sur la terre une seule âme qui n’ait pas, ou n’ait jamais eu aucune autre grâce, que celle qui, en fait, augmenterait sa damnation et c’était à cela que Dieu l’avait destinée. »

John Wesley ne pouvait accepter l’idée d’un Dieu qui créerait des êtres pour peupler l’enfer ! Si la grâce a été manifestée en Jésus, tous pouvaient y avoir accès et c’est ce qui a poussé cet homme à proclamer la Bonne Nouvelle à des foules entières durant toute sa vie !

Puisse Dieu nous aider à être ses témoins et ses serviteurs !


©janvier 2019 – Albert Leclercq – Que dit la Bible sur la prédestination –

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